Nos boules de pétanque se sont cognées pour la première fois sur un terrain du parc Lafontaine de Montréal, un chaud mercredi de l’été 2016. Aimée Lévesque m’informe, entre deux-trois lancers de cochonnet, qu’elle parle le serbo-croate et qu’elle a fait plusieurs longs séjours dans ma région natale. Je teste sa prononciation de nos lettres de l’alphabet les plus fourche-langues, et m’assure de sa compréhension des jurons réservés aux initiés. Quelques années et « au revoir (doviđenja) » plus tard, nos chemins se croisent à l’aéroport Pierre-Elliot Trudeau. Je partais en Islande avec mon frère. Aimée, en début d’année sabbatique, venait chercher un ami dont le vol atterrissait justement de Reykjavik. Nous cassons la croûte autour de ce classique québécois qu’est le poulet BBQ avec frites, spécial Saint-Hubert, placotons avec passion de vins, Balkans, projets de vie. En 2020, ni l’une ni l’autre ne court plus les aéroports, alors nous connectons autour du blogue fraîchement lancé avec ma cousine pour une entrevue bilingue.
Naše kuglice za petanku prvi put su se pogodile na terenu u parku Lafontaine u Montrealu, te vruće srijede ljeta 2016-te. Aimée Lévesque me obavještava, između dva-tri bacanja metalnih kugli, da govori srpsko- hrvatski i da je nekoliko puta boravila u mojoj rodnoj zemlji. Testiram njezin izgovor mekanog i tvrdog “č” i par psovki rezervirane samo za inicirane. Nekoliko godina i “doviđenja” kasnije, putovi nam se ukrštavaju u zračnoj luci Pierre-Elliot Trudeau. Ja tada sa bratom putujem na Island, dok je Aimée došla pokupiti prijatelja čiji je let baš slijetao iz Reykjavika. Častimo se klasičnom kebečkom “poslasticom “, to jest BBQ piletina s pomfritom, specijalitet lanca Saint-Huberta. Brbljamo sa strašću o vinima, Balkanu i životnim projektima. Sada, u 2020. godini nijedna od nas više ne čami po aerodromima, ali ovaj blog dao nam je razlog da se ponovo povežemo.
Ana G. : Aimée, tu es linguiste de formation. Alors qu’il y a des milliers de langues vivantes dans le monde, tu as choisi d’apprendre, entre autres, le bosnien/serbo-croate et le turc. Qu’est-ce qui t’a pris ? Pourquoi pas le mandarin, ou le coréen ?
Aimée L. : En fait, une des premières langues que j’ai apprises est le japonais lors d’un échange étudiant. Après avoir établi une base dans plusieurs langues à travers les années, je voulais poursuivre l’apprentissage en un lieu où je sentais une connexion culturelle, en plus du défi d’apprendre une langue slave. La Croatie, avec Dubrovnik en pleine saison touristique ne m’interpellait pas, alors j’ai continué mon voyage jusqu’à la Bosnie-et-Herzégovine. En m’installant à Sarajevo, je me suis dit que ça serait bien que je puisse communiquer ! Je me suis inscrite dans une école de langues, avec des professeures exceptionnelles, qui partageaient les mêmes valeurs féministes que moi. Après, une suite de rencontres amoureuses et amicales m’a menée jusqu’à la Turquie.
AG: Aimée, po struci si lingvist. Iako na svijetu postoji vise tisuća modernih jezika, ti si, između ostalih, odlučila naučiti bosanski /srpsko-hrvatski i turski jezik. Šta te je privuklo ka njima? Zašto ne mandarinski ili korejski?
AL : Zapravo, japanski je jedan od prvih jezika koje sam naučila, na razmjeni učenika. Kroz godine sam osnovala solidnu bazu više jezika, pa sam željela nastaviti učenje na mjestu s kojim osjećam kulturnu povezanost. Pored toga, predstavljalo mi je izazov da savladam jedan slavenski jezik. Hrvatska, s Dubrovnikom u jeku turističke sezone, nije me privlačila, pa sam nastavila put prema Bosni i Hercegovini. Kad sam se smjestila u Sarajevo, pomislila sam kako bi bilo dobro kada bih uspjela komunicirati! Upisala sam se u školu jezika gdje su bile divne učiteljice koje su imale iste feminističke poglede kao i ja. Nakon toga, niz romantičnih i prijateljskih susreta odveo me u Tursku.
AG : En 2017, tu as publié le magnifique recueil de poèmes aux éditions de La Peuplade, qui relate des perles de ton enfance, auprès de ta grand-mère. Tu nourrissais déjà de tes mots le blogue Hiroshimem et après, Le Coeur voyageur. Peux-tu nous parler de ta démarche créative, de qu’est-ce qui te fait donner naissance à ces mots, images et pensées ?
AL : La poésie, c’est le langage de l’invisible, on joue sur les sonorités, ce qui est dit et non-dit. J’aime beaucoup l’idée créer une image forte en peu de mots, qui évoque quelque chose de plus grand. Dans ma tête, je fais tout plein d’associations. Je suis synesthésique, alors je mélange de couleurs et des voyelles, ma tête est pleine de possibilités. L’écriture est foisonnante et spontanée, je coupe par la suite pour arriver à quelque chose de minimaliste, qui crée des associations fortes. C’est un vrai travail, car le premier jet est rarement bon. J’utilise les mots des autres langues. L’année dernière, j’ai participé à un spectacle de langue chorale, où je donnais des instructions de danse en turc et japonais, en bosnien, en français. Ces juxtapositions permettent d’aborder des questions de l’identité, de l’étrangeté. Mon travail me fait souvent penser à un patchwork de mots et d’expressions…où le fil conducteur qui lie les pièces, c’est moi.
AG: Godine 2017-e, objavila si divnu zbirku pjesama u izdanju izdavačke kuće La Peuplade, koja nam pruža pogled na male bisere tvog djetinjstva uz tvoju baku. Svojim riječima si već hranila blog Hiroshimem, a malo kasnije uslojedio je tvoj projekt Le coeur voyageur (Putujuće srce). Možeš li nam reći nešto više o svom kreativnom procesu, kako se rađaju tvoje riječi, slike i misli?
AL: Poezija je jezik nevidljivog, igramo se zvukovima, onome što je rečeno i neizrečeno. Jako mi se sviđa ideja da u nekoliko riječi stvorim snažnu sliku koja dočarava nešto puno veće. U svojoj glavi stvaram razne asocijacije. Sinestetik sam, pa miješam boje i samoglasnike, glava mi je prepuna mogućnosti. Moje pisanje je obilno i spontano, a zatim ga izrežem kako bih postigla nešto minimalističko, što stvara jake asocijacije. To je veliki posao, jer prvi je nacrt rijetko dobar. Često koristim riječi iz drugih jezika. Prošle godine sudjelovala sam u predstavi gdje sam davala plesne upute na turskom, japanskom, bosanskom i francuskom. Ta jukstapozicija omogućava nam da se pozabavimo pitanjima identiteta i neobičnosti. Zapravo, moj rad me često podsjeća na patchwork riječi i izraza … gdje sam ja ta zajednička nit koja povezuje dijelove.
AG : Tu as beaucoup voyagé dans la région des Balkans. La région traîne un lourd héritage, pour les raisons que l’on connaît, et les voyageurs peuvent parfois avoir du mal à transcender ce passé, sauter par-dessus les cicatrices pour se laisser saisir par ses (imparfaites) beautés actuelles. Est-ce que tu peux nous partager un lieu ou une expérience (au sens très large) qui t’a marquée au cours de tes séjours, et qui n’aurait absolument aucun lien avec le conflit de 1992-1995 ?
AL: C’est une belle question, car c’est facile de répondre „Ahhh, toute l’histoire est frappante.“ Le moment qui me revient comme étant particulièrement magique est celui où j’ai débarqué à Sarajevo pour la première fois. Il pleuvait à boire debout, je portais mon gros sac à dos. Une envie de pipi m’amène aux toilettes de la gare. Je n’avais pas la bonne monnaie pour payer la dame à la porte, c’est elle qui a fouillé le change dans ma main. Par la suite, je réalise que je suis à 1h15 de marche de mon hôtel. La rue centrale me fait longer les néons des gros centre d’achats, des espaces publics et de vieux bâtiments autrichiens, ottomans ou de l’époque yougoslave, le tout entouré de belles montagnes et d’une nature présente. Tout contrastait avec les espaces croates plus désertiques traversés en autobus. En déambulant, j’ai eu l’impression de traverser quatre pays différents, il y avait tant à explorer. Après, je me suis mise à visiter des salons de thé, des bars à vin sympathiques, où il était facile de développer des liens avec les gens.
AG: Putovala si diljem balkanske regije. Ona ima teško naslijeđe, iz razloga koje svi znamo, a putnicima je ponekad nezgodno nadići tu prošlost, da zaborave ožiljke kako bi se prepustili njezinim sadašnjim (često nesavršenim) ljepotama. Možeš li podijeliti s nama mjesto ili iskustvo (u vrlo širokom smislu) koje te je obilježilo tijekom boravka i koje nema apsolutno nikakve veze sa sukobom od 1992.-1995. godine ?
AL: To je lijepo pitanje, jer je lako odgovoriti: “Ahhh, cijela povijest je upečatljiva.” Trenutak koji mi se čini posebno čarobnim je kada sam prvi put stigla u Sarajevo. Kiša je lila nemilice, a ja sam nosila svoj veliki ruksak. Fizičke potrebe dovele su me do zahoda na stanici. Nisam imala pravi kusur da platim gospođi na vratima, tako da mi ga je ona razabrala u ruci. Nakon toga shvatila sam da imam 1 sat i 15 minuta hoda do mog hotela. Glavna ulica me uz neonska svjetla vodila do velikih trgovačkih centara, javnih trgova i starih austrijskih, osmanskih ili jugoslavenskih zgrada, okruženih prekrasnim planinama i prirodom. Sve je bilo u kontrastu s pustinjskim hrvatskim prostorima koje sam prošla autobusom. Dok sam lutala, osjećala sam se kao da prelazim četiri različite zemlje, toliko je toga bilo za istražiti. Kad sam se smjestila, počela sam posjećivati čajarne i lijepe vinske barove, gdje je bilo lako stupiti u kontakt s ljudima.
AG : Tu prépares un livre de poésie où tu présentes la vie de plusieurs femmes bosniennes. Parle-nous de la génèse de ce projet.
AL : L’idée m’est venue en consultant mon guide de voyage, où des noms de femmes intéressantes revenaient. Pourtant, je n’avais pas entendu parler d’elles dans les musées ou en visitant des monuments. Elles n’ont pas reçu beaucoup d’attention dans l’histoire officielle. En prenant des notes dans mes carnets de voyage, l’idée m’est venue de faire ma contribution à ce niveau. Le projet présentera les profils de 27 femmes de l’ex-empire austro-hongrois, dont Nana Sida Kolar, Admira Ismic, Laura Papo Bohoreta, avec leurs biographies en vers et des carnets de voyage où je m’adresse à elles. C’est un projet de longue haleine. Le but est de trouver la façon pour équilibrer le côté hermétique, flou, de la poésie avec une approche plus didactique et le point de vue de la voyageuse, tout en offrant un livre intéressant.
AG: Pripremaš knjigu poezije u kojoj prezentiraš par markantnih bosanskih žena. Reci nam nešto više o samom začetku ovog novog projekta.
AL : Ideja mi je pala na pamet prilikom listanja turističkog vodiča, gdje su se neprestano javljala imena zanimljivih žena. Ipak, nisam čula za njih u muzejima ili tijekom posjeta spomenicima. U službenoj povijesti nisu dobile puno pažnje. Dok sam bilježila svoje putopisne dnevnike, palo mi je na pamet da dam svoj doprinos toj temi. Znači, projekt će predstaviti profile 27 žena iz bivšeg Austro-Ugarskog Carstva, uključujući Nanu Sidu Kolar, Admiru Ismić, Lauru Papo Bohoreta, s njezinim biografijama u stihovima i putopisnim dnevnicima u kojima im se obraćam. Ovo je dugoročni projekt. Cilj je pronaći način za uravnoteženje hermetičke, nejasne strane poezije s didaktičnijim pristupom i gledištem putnika, uz istovremeno pružanje jedne zanimljive knjige.
AG : Je trouve que tu as un prénom qui fait très « Balkans » ! J’ai toujours trouvé que dans les langues bosnienne/serbe/croate l’on retrouve des prénoms colorés qui évoquent des concepts du monde réel (ex. Jagoda = Fraise, Vuk = Loup), ou des qualités que l’on veut posséder (ex. Mirna=Calme). Alors, dis-nous, Voljena, en ces temps singuliers, comment on peut faire pour s’aimer et aimer mieux ?
AL: En fait, les noms concepts existent dans plusieurs langues et ils sont cool car ils créent cette proximité avec le réel. À l’étranger, mon nom ne veut souvent rien dire. Cependant, lorsque je l’explique, les gens s’émerveillent. C’est un prénom tout de même lourd à porter, car il implique que je dois toujours plaire à tout le monde. À l’époque, je ne voulais pas inquiéter ma famille, alors que je voulais vraiment faire un long voyage dans les Balkans, en prenant le temps. Aimer, c’est surtout s’aimer soi-même. Je travaille à donner de l’espace à mes désirs, rationnels ou pas, à arrêter le discours de tension entre le „devoir“ et le „vouloir“. À Sarajevo et à Istanbul, on me demandait souvent pourquoi je suis là, au début je lançais tout un tas de raisons…J’ai fini par être capable de dire „Je ne sais pas, nous verrons.“ , ce qui est une réponse plus authentique. Neznam, vidjećemo. Aujourd’hui, je prends soin pour m’entourer des gens qui me ressemblent, des gens qui vivent selon leurs propres normes. Il faut se honorer soi-même, même si l’on sait pas toujours pourquoi on le fait. Par-delà le sentiment d’imposture, j’ai lancé „Le Bruit de l’eau“, mon entreprise de thés https://lebruitdeleau.ca/, et nous voilà. Vidjećemo šta će biti.
AG: Mislim da imaš ime koje zvuči vrlo “balkanski”! Uvijek sam smatrala da u bosanskom / srpskom / hrvatskom jeziku nalazimo živopisna imena koja evociraju koncepte iz stvarnog svijeta (npr. Jagoda, Vuk) ili osobine koje želimo posjedovati (npr. Mirna) . Reci nam, Voljena, u ova jedinstvena vremena, kako možemo voljeti bolje, sebe i druge?
AL: Zapravo, imena-koncepti postoje na nekoliko jezika i oni su cool jer stvaraju tu bliskost sa stvarnošću. U inozemstvu moje ime često ništa ne znači. Međutim, kad ga objasnim, ljudi se iznenade. To je nezgodno ime, jer podrazumijeva da uvijek moram svima udovoljiti. Na primjer, htjela sam otići na dugo putovanje na Balkan, ali nisam željela zabrinuti svoju obitelj. Voljeti prije svega znači – voljeti sebe. Radim na tome da dam prostora svojim željama, bile one racionalne ili ne, da zaustavim diskurs napetosti između “moranja” i “volje”. U Sarajevu i Istanbulu često su me pitali zašto sam ovdje, na početku sam iznosila čitavu hrpu razloga. Na kraju sam si dozvolila da jednostavno kažem: „Ne znam, vidjet ćemo.“, što je puno autentičniji odgovor. Danas se trudim da se okružim ljudima koji nalikuju meni, ljudima koji žive po svojim mjerilima. Svoje želje se moraju ispoštovati, čak i ako ne znate uvijek zašto to radite. To mi je pomoglo pokrenuti “Le Bruit de l’eau” (Zvuk vode), svoju čajnu tvrtku, i eto nas.
AG : Enfin, tu es une fine connaisseuse des vins des Balkans. Quel vin de la région nous recommandes-tu pour accompagner la lecture d’un texte d’Aimée Lévesque ?
AL : C’est tellement très dommage que l’on n’ait pas accès aux vins de la région à la Société des alcools du Québec. Dans les blancs, je recommande fortement le cépage Žilavka, que j’ai découvert dans un bar à vin de Sarajevo. Dans le rouge, une bouteille de Blatina fera très bien l’affaire. Nazdravlje!
AG: Napokon, ti si dobar poznavatelj balkanskih vina. Koje vino iz regije preporučuješ da prati čitanje jednog teksta od Aimée Lévesque?
AL: Šteta što nemamo pristup vinima iz regije u Québecu. Što se tiče bijelog, preporučujem Žilavku, koju sam otkrila u sarajevskim vinskim barovima. U crnoj varijanti, jedna boca Blatine će sasvim dobro poslužiti. Nazdravlje!
Entrevue et traduction: Ana G.
Intervju i prevod: Ana G.
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